Gratitude pour ces 13 années au service de la pastorale scolaire : comme accompagnateur théologique, intervenant aux journées Relais, auteur de nombreux articles, accompagnateur dans les écoles …
Voici quelques très belles pensées de la part de collègues – amis qui ont parcouru un bout de chemin de la pastorale et de la vie avec Jean-François.
Il faisait froid, sec et lumineux, ce mercredi 25 novembre. Vraiment un temps pour aller marcher. Un temps qui aurait donc convenu à Jean-François. On célébrait ses funérailles pourtant…
Plus On avance, plus on s’habitue à ne pas s’habituer à cela.
Quand le cercueil parait, à l’église, on ne s’imagine pas que le corps d’une personne aimée soit enfermé dedans. On ne s’imagine pas… Mais le réel nous tombe dessus. Et où est donc le vrai, dans ce balancement d’imaginaire tronqué et de réalité trop crue ?
Je n’étais donc pas le seul à avoir les yeux mouillés, quand le cercueil de Jean-François est entré dans l’église Saint-Paul à Waterloo. Il était dix-heures trente. Le temps était radieux. Nous étions en tout petit nombre : quinze personnes, tout juste comptées selon les règles.
La cérémonie était sobre (forcément), brève (forcément), mais ce qui n’étais pas forcément assuré, au vu des circonstances, c’était que ce trop petit nombre de personnes représenterait une foule immense. Les paroissiens de Waterloo s’étaient donné le mot : ils resteraient chez eux, allumeraient une bougie, et se recueilleraient pendant les absoutes.
Quel beau symbole…
Jean-François Grégoire (1953-2020) a allumé sans le vouloir de très nombreuses bougies chez de très nombreuses personnes. Il ne vivait pas son sacerdoce dans les nuages. Les racines de son ciel puisaient le suc de sa prière dans la lecture, dans la marche, mais principalement peut-être dans l’amitié. Ses nombreuses affections ont d’ailleurs été évoquées pendant la célébration du 25 : des écrivains, des jeunes, des sportifs, des lecteurs, des paroissiens… des enseignants.
Attardons-nous sur ce dernier terme, puisque nous sommes enseignants.
L’attrait de Jean-François pour les profs remontait à sa plus haute enfance. Firmin, son papa, enseignait les mathématiques à Braine L’alleud. C’est par un professeur de ce collège, d’ailleurs, que Jean-François a commencé à nourrir sa vocation de prêtre. Il aurait bien aimé, lui aussi, être un abbé dans les écoles. Mais les autorités diocésaines ne souhaitaient plus investir dans l’enseignement. Jean-François s‘est retrouvé aux études (deux thèses, tout de même), et en paroisse, puis en prison, comme aumônier.
Je trace à trop grands traits ce parcours riche et sinueux. Mais je pense à ce témoignage de détenu, qu’on a pu aussi entendre à l’église, ce 25 novembre : « Il ne nous considérait pas comme des coupables, mais comme des amis. » Jean-François, qui aimait Brassens, aurait pu dire avec ce chanteur que « Les récompenses, comme les punitions faisaient partie d’un système de valeurs qu’il ne partageait pas ». Il aurait pu répéter, avec Simon Weil : « Le premier des principes pédagogiques, c’est que, pour élever quelqu’un, enfant ou adulte, il faut d’abord l’élever à ses propres yeux ».
Jean-François a animé de nombreuses retraites scolaires. Il a très peu enseigné dans le secondaire, mais abondamment ici et là : au séminaire, dans des sessions, dans des parcours théologiques… Puis, à l’invitation de Rosy Demaret, il est entré dans l’équipe de Pastorale scolaire, sous la responsabilité, ensuite, de Marc Bourgois.
Au cours de nos réunions, il était vivant, attentif, jamais envahissant. Mais il nous invitait discrètement à lever les yeux, à perdre tout esprit de concurrence ou de conquête, à servir les écoles. Servir sans arrière-pensée, au nom de l’Évangile. Pas pour rallier à l’Évangile, mais pour permettre et favoriser la croissance de tous au nom de Jésus-Christ.
Jean-François nous a appris l’absolue gratuité du geste de croire. Dans le balancement entre l’imaginaire dépecé, qui nous dirait : Eh, ce n’est pas possible qu’il soit mort, et le réel brutal : il est bien là, entre ces quelques planches de bois, se lève le vrai.
Le vrai ? C’est ce qui continue en nous, grâce à lui, avec nous, grâce à Dieu.
Jean-François Grégoire au service de l’Animation Pastorale Scolaire Bruxelles Brabant Wallon : quelques repères …
Jean-François Grégoire, docteur en théologie, en philosophie et lettres et moraliste apparait dans la publication Cardan n°108 de juillet 2005, en un article de fond : « Devenir des spirituels ». Il devient à ce moment « accompagnateur théologique de l’équipe de Pastorale scolaire pour Bruxelles et le Brabant wallon », pour une durée finale de 13 ans. Il a été également durant de nombreuses années référent de qualité au sein de l’équipe d’animation spirituelle du Collège Notre-Dame de Basse-Wavre. Il avait par ailleurs intégré l’équipe enseignante du collège dans les années 90, comme professeur de français.
Plaçant toujours l’Humain au centre, et concédant aux règles leur juste et raisonnable place, Jean-François a été prêtre en paroisse dans divers lieux, mais toujours au Brabant Wallon, qu’il aimait beaucoup. Il rassemblait des assemblées ferventes et ouvertes à l’avenir.
Jean-François Grégoire a rédigé deux thèses : une en théologie : « L’AMOUR ET LA HAINE DANS L’OEUVRE DE MICHEL DEL CASTILLO », une autre, en lettres sur LE SPIRITUEL DANS L’OEUVRE D’ANDRE DHÔTEL ». Auteur de livres et de nombreuses publications, il a au cours des années animé de nombreux groupes de lecture…
Jean-François a toujours été intéressé, passionné même parfois, par la vie des écoles
Jean-François aimait le sport et les sportifs, courir, marcher.
Jean-François était aumônier de prison.
Il a aussi collaboré avec Entraide et Fraternité…
On doit évidemment rappeler son soutien inconditionnel à l’équipe d’Animation Pastorale Scolaire Bruxelles Brabant wallon.
Son apport a été considérable. L’accueil de l’équipe lors des rencontres au Vert, les eucharisties d’équipe à Saint-Paul (Waterloo), ouvertes aussi aux paroissiens : l’occasion de brefs partages entre les équipiers et ces quelques paroissiens, le plus souvent fidèles eux aussi.
Evoquons à leur tour les interventions de Jean-François lors de journées des Relais, lors des journées de ressourcement puis de formation, lors des sessions Profs & Chrétiens : un récit banal, une reprise théologique et en un instant, l’anecdote prenait tout son sens, dans des directions et horizons insoupçonnés…
D’un point de vue rédactionnel, lisant Jean-François, chacun pouvait apprécier sa manière de jongler avec les idées tout autant qu’avec l’écrit et ses règles, ses mots, sa syntaxe, sa ponctuation.
Jean-François, dans les premières années, a assuré pratiquement tous les articles de fond du Cardan. Finalement, près de 35 articles de fond, sans compter des contextes de fiches bibliques, invitations à lire, divers apports encore, et depuis novembre 2013, sa relecture quelque peu décentrée et décentrante des mot-clés de l’enquête 2011-2012 du CodiEC, dont la compilation a fait par ailleurs l’objet d’une édition très réussie : « Des mots pour le dire », CoDiEC-Bruxelles, 2019.
Quelques titres d’articles ont fait date dans ma mémoire :
07/2005 Devenir des spirituels
09/2005 Pourquoi parler de sources et de re-sources ?
11/2005 Prière
01/2006 Exposé « Journée des Relais »
05/2006 À la rencontre
11/2006 Opérateurs de rencontre
09/2006 Un malheur pour la rencontre : le préjugé
01/2007 Le tiers sans lequel nulle rencontre n’est possible
05/2007 Écologie, personne et communauté
07/2007 À deux pas de chez soi
09/2007 Le repas dans la Bible
01/2008 Justesse et sobriété
03/2008 Des animaux au paradis
05/2008 Écoutez et vous vivrez
11/2008 L’inouï
03/2009 Écouter Dieu
11/2009 Responsabilité
11/2011 Sept lois pour vivre ensemble
01/2012 Huit voies vers la Joie parfaite
11/2012 Choisir
11/203 Mot-clé : « accueil »
05/2013 Fidélité
11/2013 Vivre le temps
03/2014 Pâques : « Ne pas attendre de mourir pour ressusciter »
05/2014 Aimer mon temps
07/2014 Courage
09/2014 Pourquoi Jésus-Christ ?
05/2015 Les poches du Christ
09/2015 L’école ensemble
01/2016 Le Jubilé de la Miséricorde
05/2016 Transitions
07/2016 « Nous », ou comment vivre ensemble ?
09/2016 Proposition de lecture de l’encyclique Laudato ‘si