Dans une discrétion absolue au point que nombre d’entre nous n’en n’avaient encore jamais entendu parler jusqu’ici, la marche Jai Jagat (« Victoire d’un monde pour tous ») a démarré ce 2 octobre à New Delhi.
Mais de quoi s’agit-il exactement ? D’une grande marche d’un an, qui reliera la ville de Gandhi à celle de l’ONUG, permettant ainsi à des milliers de gens et surtout à ceux qu’on n’entend jamais, de venir parler de visu aux représentants des Nations Unies à Genève. Voilà pour le mobile officiel, le but et l’aboutissement de ce périple un peu fou qui fera traverser 10 000 kms à des Indiens courageux et pleins de foi… Mais le réel motif de cette grande marche des pauvres tient surtout dans la création de liens, ce lien fraternel qui nous manque tellement dans notre mode de vie occidental hyper-globalisé, hyper-connecté, hyper consommateur. En effet, en traversant 17 pays, en logeant chaque soir de fermes en fermes, de villages en villages, de collectifs citoyens en mouvements de transition, c’est de l’espoir et de l’intelligence dont il est question en vérité… Comment construire, là où nous sommes, ce monde nouveau dont nous ressentons l’urgent besoin derrière la clameur des jeunes, le cri des pauvres et de notre maison commune qui reconnaissons-le, prend un peu l’eau ? Voilà bien ce qui a débuté ce 2 octobre dans une ville actuellement recouverte d’un nuage de particules fines, au moment où nous rédigeons cet article.
Mais nous, là-dedans, que pouvons-nous y faire en tant qu’attachés au monde de l’enseignement ou membres d’une pastorale scolaire ? Eh bien, modestement, nous avons notre petite pierre à y mettre. Comme le randonneur qui peut, s’il le veut bien, ramasser et ajouter son humble caillou au monticule balise qu’on appelle en montagnes « un kern ».
L’an passé, deux enseignants sont venus nous interpeller. Ils faisaient partie du mouvement « Jai Jagat-Belgique » et se demandaient comment y intégrer les jeunes des écoles francophones. Car, dans notre petit royaume aussi, à partir de juillet 2020, des hommes et des femmes marcheront au départ de Bruxelles pour rejoindre les Indiens à Genève. Ils logeront de fermes en fermes. Ils retisseront ce lien eux aussi. Et convergeront depuis nos contrées jusqu’à Avioth, point de ralliement d’autres marches européennes vers Genève. Or donc, ces enseignants cherchaient à faire participer les jeunes à cette grande marche, au moment précis où ces derniers allaient descendre dans les rues, en masse, pour exiger une prise de conscience climatique.
C’est ainsi que forts de cet appel, nous nous sommes réunis pour créer « Jai Jagat écoles ». Avec des profs (de Bruxelles, de Visé, de Namur, de Verviers ou de Binche, …) des membres de pastorales de jeunes, des pastorales scolaires ou d’associations comme Entraide et Fraternité. Et tout ce petit monde hétéroclite, enseignant ou pas, croyant ou non, s’est mis d’accord pour organiser une « pré-marche » Jai Jagat, avec pour point d’orgue un grand Forum des Jeunes, au mois de mars 2020, en proposant cette démarche aux jeunes des écoles de différentes provinces. C’était une gageure folle. Nous ne savions pas si ce projet réunirait 50 ou plutôt 500 jeunes. Nous n’avions pas de lieu pour un tel rassemblement, pas de sous, aucune certitude d’aboutissement. Juste l’intuition qu’il était bon de rejoindre ce grand mouvement international de Justice et de Paix et d’ y vivre concrètement les intuitions de Laudato Si dans le sillage des méthodes de Gandhi…
Il faut croire que l’Esprit Saint et une solide dose de bonne volonté humaine a pris l’affaire à cœur car aujourd’hui, le projet est bien en route. Nous accueillerons le 27 mars prochain plusieurs centaines de jeunes issus d’une quinzaine d’écoles très diverses, pour une marche d’un, deux ou trois jours. Celle-ci se vivra en mixité, avec des migrants et des personnes qui œuvrent aux quotidien dans des associations pour mettre en place les 4 thématiques du mouvement Jai Jagat : Paix et Non-violence. Inclusion sociale. Réduction des inégalités. Reconstruction écologique.
Cette marche des jeunes aura bien sûr été préparée dans les cours et dans les classes depuis le début de l’année scolaire. Elle se clôturera par un grand forum ouvert au Centre de la Croix-Rouge à Jambes, là où précisément résident 300 demandeurs d’asile qui, beau renversement de situation, accueilleront et nourriront une centaine de jeunes, migrants d’un jour. Cet événement, aussi démocratique que festif, aura pour finalité de recueillir en intelligence collective les intuitions et revendications de la jeunesse belge que quelques-uns d’entre eux iront porter ensuite à Genève.
Alors, si vous voulez en savoir plus, joindre vos forces aux nôtres de là où vous êtes, par un soutien financier, logistique ou simplement quelques heures de votre temps au mois de mars 2020, n’hésitez pas à nous contacter. C’est la pierre ajoutée par chacun qui formera ce « kern » afin que la marche des jeunes soit balisée par l’expérience des anciens. Nous leur devons bien cela…
